Résumé
Naviguer dans l’environnement, se rendre d’un endroit à un autre, est l’une des compétences les plus fondamentales et vitales du règne animal, et les humains ne font pas exception. Pour réussir à naviguer, un animal doit créer une « carte cognitive » interne de son environnement extérieur. Cela est réalisé par un système spécialisé du cerveau, où plusieurs régions et différents types de cellules jouent chacun un rôle spécifique. Dans cet article, je décris quelques-uns des principaux composants de ce système interne de navigation, en me concentrant sur les cellules de grille, un groupe étonnant et surprenant de cellules nerveuses que nous avons découvertes, et qui créent un système de coordonnées dans le cerveau. Je terminerai par te livrer quelques recommandations générales, basées sur mon expérience personnelle.
La professeure May-Britt Moser a remporté le prix Nobel de physiologie ou de médecine en 2014 pour la découverte de cellules qui constituent un système de positionnement dans le cerveau.
Interview et co-écriture par Noa Segev, diplômée du programme Grand Technion Energy, Technion, Institut israélien de technologie, Haïfa, Israël.
Quand tu penses à la navigation, quelle est la première chose qui te vient à l’esprit ? Le fameux système GPS de ton téléphone portable ? Le voyage d’un sous-marin jusqu’à sa destination ? Ou peut-être une sortie de scouts, qui doivent retrouver, de nuit, leur chemin vers le camp ? Et si je te disais que ton cerveau a un système intégré de navigation, qui est capable de te localiser dans l’espace et de t’orienter pour t’amener là où tu veux aller ? Cette représentation mentale de l’environnement est souvent appelée « carte cognitive ». Alors que la navigation dans l’espace semble fluide et automatique, le système qui la permet est en fait assez complexe, composé de plusieurs régions du cerveau et de divers types de cellules. Cet article te guidera dans un labyrinthe d’énigmes sur la navigation, qui t’amènera finalement à découvrir un système très spécial de cellules nerveuses du cerveau appelé « cellules de grille », un système de positionnement que John O’Keefe, Edward Moser et moi avons découvert et pour lequel nous avons reçu un prix Nobel en 2014.
Étape 1 : où es-tu en ce moment ?
Pour commencer à naviguer dans l’environnement, quelle est la première étape requise ? Tu l’auras deviné ! Tu dois connaitre ta position actuelle. Peux-tu imaginer comment le cerveau s’y prend ? Je vais te donner un indice – c’est différent de la façon dont procède le GPS de ton téléphone portable. Comme tu le sais peut-être, le GPS utilise des signaux envoyés par au moins quatre satellites différents en orbite autour de la Terre. À l’aide de calculs mathématiques basés sur des principes physiques complexes, ces signaux satellites sont utilisés par ton téléphone pour déterminer ta position avec une grande précision.1 Mais le cerveau reçoit-il des signaux d’une source extérieure pour déterminer ton emplacement ? Pas du tout. Alors, comment fait-il pour te positionner ? Essaye d’imaginer au moins deux solutions à cette énigme avant de passer au paragraphe suivant.
Il s’avère que, dans le cerveau, il y a des cellules de place, des cellules nerveuses qui identifient ton emplacement. En 1971, John O’Keefe et John Dostrovsky étudiaient l’activité électrique dans le cerveau des rats [2]. Lorsqu’ils ont examiné une région du cerveau appelée « hippocampe », ils ont constaté que lorsque l’animal se trouvait à un endroit spécifique de son environnement, certaines cellules nerveuses devenaient actives et commençaient à émettre des signaux électriques à un rythme élevé (Figure 1). Des cellules différentes s’activaient lorsque le rat était dans un autre endroit. En d’autres termes, si tu te tiens à un endroit particulier de ta chambre, il y a une cellule de place spécifique dans ton hippocampe qui est fortement active, et cette cellule t’indique où tu es. L’activité électrique des cellules de place est si précise que, si on enregistre simultanément l’activité d’une centaine d’entre elles pendant un certain temps, on pourra prédire l’emplacement d’un rat à moins de 5 cm ! C’est tout à fait extraordinaire, car ces cellules sont profondément enfouies dans le cerveau, loin des sens ; elles n’ont ni yeux ni oreilles, ni aucun autre organe sensoriel, alors comment obtiennent-elles leurs informations sur l’environnement ?
Étape 2 : jusqu’où es-tu allé et où es-tu arrivé ?
Disons que tu as compris que lorsque tu te tiens à un endroit spécifique, tu actives une cellule de place spécifique. Imagine maintenant que tu as ensuite marché pendant un moment et déterminé ton nouvel emplacement, en utilisant une autre cellule de place. Mais comment connaître la distance entre ces deux endroits ? En d’autres termes, comment les relier entre eux ? Tout d’abord, essaye de penser à ce que tu dois savoir pour calculer la distance entre deux points. Si je te disais que je marche pendant 2 minutes, que me demanderais-tu pour savoir jusqu’où j’ai marché ? En fait, tu aurais besoin de connaître ma vitesse de marche. Le cerveau résout ce problème à l’aide de cellules de vitesse [3], qui indiquent ta vitesse de déplacement. Ces cellules ne se trouvent pas dans l’hippocampe, mais dans une région cérébrale profonde différente, le cortex entorhinal.
Connaissant mon point de départ, ma vitesse de marche et combien de temps j’ai marché, peux-tu dire où je suis maintenant, ou as-tu besoin d’informations supplémentaires ? Par exemple, si tu savais que le point de départ et le point de destination sont à 100 m l’un de l’autre, pourrais-tu dire où je me trouve sur un cercle autour de mon point de départ, qui a un rayon de 100 m ? (Figure 2). Il te manque encore une information : tu as besoin de connaître la direction. Pour ça, le cerveau possède également des cellules de la direction de la tête, qui se trouvent dans plusieurs zones [4]. Lorsque ces cellules sont activées, elles informent l’animal de la direction dans laquelle il se déplace. En connaissant ton emplacement initial, ta vitesse et ton temps de marche, ainsi que ta direction de marche, tu peux connaitre exactement ton point d’arrivée par rapport à ton point de départ (Figure 2).
Étape 3 : y a-t-il d’autres moyens de savoir où tu es et d’autres parcours à faire ?
Voici une énigme difficile (mais enrichissante). Pour naviguer d’un point A à un point B, nous avons vu qu’il suffit de connaître le lieu de départ, la vitesse, la durée et la direction du mouvement. Cependant, à la surprise de nombreux chercheurs sur le cerveau, ce dernier utilise une astuce supplémentaire et étonnante pour résoudre le problème de la navigation. Je vais te donner un indice : elle est liée à un système de coordonnées sur une carte. Ce système cérébral est le système des cellules de grille.
Le système des cellules de grille est situé au milieu du cerveau, un peu en dessous du niveau de l’oreille, dans une zone cérébrale profonde – le cortex entorhinal (Figure 3, zone violette), qui se trouve près de l’hippocampe. Contrairement aux cellules de place de l’hippocampe, qui deviennent actives lorsque l’animal passe par un endroit spécifique, une cellule de grille devient active quand l’animal se trouve à différents endroits (Figure 3). Découverte surprenante : ces emplacements forment un motif géométrique symétrique et extrêmement précis, caractérisé par des triangles équilatéraux (dont tous les côtés ont la même longueur) reliant les centres des emplacements proches. Ces emplacements, appelés coordonnées, forment une grille hexagonale (polygone à six côtés). C’est pour ça que nous avons décidé de nommer les cellules de ce système « cellules de grille ».2 Il est important de souligner que les modèles de coordonnées des cellules de grille sont générés dans le cerveau, ils n’existent pas dans le monde extérieur.
Chaque cellule de grille forme un motif unique de coordonnées qui est décalé par rapport aux coordonnées formées par d’autres cellules de grille proches. De cette façon, tout l’environnement est « rempli » de motifs de grille (Figure 4A). En utilisant une seule cellule de grille, on ne peut pas savoir où se trouve l’animal, car chaque cellule de grille est active à plusieurs endroits, formant une grille. Mais, en raison du changement de position entre les différentes cellules de grille et des échelles variables des grilles (Figure 4C), il est possible de définir l’emplacement actuel de l’animal avec une grande précision, en utilisant les grilles superposées de plusieurs cellules.3 Ces quadrillages servent de carte interne des coordonnées dans le cerveau et peuvent également être utilisés pour mesurer la distance entre différents points de l’espace, une exigence essentielle pour la navigation (Figure 4B).
Encore des surprises sur les cellules de grille
Nous avons constaté que la structure de la grille persiste même lorsqu’un animal marche dans l’obscurité [5]. Nous avons trouvé que, pour ancrer la grille à l’environnement spécifique dans lequel se trouve l’animal (s’agit-il d’une grande ou d’une petite pièce ?), il utilise des informations sensorielles, en particulier des informations visuelles, telles que des indices sur les murs et l’emplacement des murs dans la pièce. Les motifs de grille tournent lorsque les repères sur les murs sont tournés, et les grilles peuvent se dilater ou se contracter lorsque l’un des murs est déplacé pour agrandir ou réduire la pièce. Fait intéressant, les cellules de grille à différentes profondeurs le long du cortex entorhinal représentent le même environnement à différentes échelles [5]. Les cellules de grille situées dans la partie dorsale (supérieure) du cortex entorhinal se déclenchent à des endroits physiques distants d’environ 25 cm (Figure 4C, en haut à droite), représentant l’environnement avec une grande précision, tandis que les cellules de grille plus profondes (ventrales) forment une représentation plus grossière, prenant en compte des distances supérieures, jusqu’à 3 m (Figure 4C). Les cellules de grille avec des échelles variables conservent toutes un motif de grille symétrique similaire.
Laisse-moi t’expliquer un autre fait surprenant sur les cellules de grille. Apparemment, le cerveau n’est pas le seul à utiliser les cellules de grille pour une navigation réussie et efficace. Dans une étude fascinante récemment réalisée dans une société d’intelligence artificielle appelée DeepMind à Londres, au Royaume-Uni, des chercheurs ont donné des informations sur la direction et la vitesse de la tête à une machine d’apprentissage. La machine était censée apprendre à naviguer dans un environnement nouveau et stimulant. Après avoir appris, la machine a surpassé les humains dans la navigation. Étonnamment, la machine a spontanément créé des unités artificielles avec des motifs de grille, très similaires à ceux des cellules de grille dans le cerveau humain [6]. Qu’est-ce que cela nous dit ? Même si le motif de cellule de grille est quelque chose qui s’est produit spontanément au cours de l’évolution, il doit être extrêmement utile pour la navigation. Nous savons que le cerveau est très efficace, et s’il y a un phénomène (comme les cellules de grille) qui se produit presque par accident, il peut s’avérer bénéfique pour le fonctionnement de l’animal. Penses-y de cette façon : imagine que tu reçois un outil – un tournevis par exemple – et que tu ne sais pas à quoi il sert. Au fil du temps, tu essaieras probablement de l’utiliser dans différentes circonstances, et tu finiras par lui trouver une utilité, n’est-ce pas ? Il en va de même pour le cerveau : il explore tous les moyens d’utiliser les outils dont il dispose et les met à profit pour la survie de l’animal.
Ensemble, les cellules de grille produisent des cartes de coordonnées internes qui permettent à un animal de naviguer d’un endroit à un autre. Les cellules de grille fonctionnent à l’unisson avec les cellules de place et avec d’autres types de cellules, telles que les cellules de la direction de la tête et les cellules de vitesse. Ce système de navigation intègre également les informations des sens, pour calibrer les cartes internes en fonction de l’environnement. Tout ce système de navigation dans le cerveau nous permet d’effectuer des tâches de navigation complexes de manière fluide et automatique. Bien que nous ayons beaucoup appris sur ce système cérébral fascinant, de nombreux aspects en sont encore inconnus. Par exemple, comment est-ce que prêter attention aux indices dans l’environnement ou dans notre mémoire affecte le système de navigation ? Comment le volume du corps d’un animal est-il pris en compte lorsque l’animal se déplace ? Et qu’arrive-t-il au système de navigation dans un cerveau malade, comme dans le cas de la maladie d’Alzheimer, quand les cellules du cortex entorhinal meurent et que la capacité de naviguer se perd ? Une autre question passionnante est de savoir comment la distance et la direction entre un animal et des objets sont prises en compte dans le cortex entorhinal, et si les cellules intègrent également des objets en mouvement, comme un ballon dans un match de football [6]. Ce sont des questions difficiles et importantes, qui pourraient faire partie d’un voyage scientifique fascinant pour ceux parmi mes lecteurs qui voudraient devenir des scientifiques du cerveau.
Recommandations pour les jeunes esprits
Quand on est enfant ou adolescent, c’est utile de se rappeler qu’il est très difficile de prévoir à quoi ressemblera la vie quand on sera adulte. Je crois qu’il est important de maintenir intacte ta curiosité pour les choses, maintenant et plus tard, et de trouver quelque chose qui te passionne et te remplit d’enthousiasme. Je pense que tout est une question de passion, que ce soit pour les mathématiques, la physique, la danse, l’écriture ou tout autre chose. Suivre ta motivation interne et construire ta vie autour de tes forces et de ta passion est ce qui te permettra de rendre ta vie meilleure qu’elle ne pourrait l’être autrement.
Bien des gens te diront quelle carrière tu dois choisir et pourquoi : pour gagner de l’argent, te forger une réputation, ou peut-être même obtenir un prix Nobel. Ne les écoute pas. Choisis le chemin qui te convient, quelque chose qui t’enrichit, que tu aimes, que tu peux apprendre à maîtriser. Pour ma part, je peux dire que je suis très curieuse des choses et qu’il est extrêmement important pour moi de les comprendre. Saisir enfin ce que je ne comprenais pas auparavant, c’est ça qui me rend heureuse, c’est l’étoile qui me montre la voie.
Enfin, en tant que femme ayant remporté le prix Nobel, je trouve essentiel de souligner que lorsque tu trouves ta voie, si tu es un homme ou une femme ne devrait pas être important. Je me suis toujours considérée simplement comme une personne, et quand je suis devenu scientifique, comme une scientifique. Le fait d’être une femme ne me préoccupait pas. Je me vois comme une scientifique qui a eu beaucoup de chance, qui a travaillé très dur et qui a des collaborateurs fantastiques. C’est cela qui, au bout du compte, m’a conduite à gagner un prix Nobel. Cela dit, même si être un homme ou une femme n’est pas pertinent quand il s’agit de passion, nous devrions tous être conscients qu’il existe des environnements où on tente de mettre les femmes de côté. Dans ces environnements, nous devrions tous, hommes comme femmes, soutenir fermement les femmes et les minorités.
Contributions à la version française
TRADUCTEUR : Jean-Marie Clément (Association Jeunes Francophones et la Science, Montpellier, France)
ÉDITEUR : Catherine Braun-Breton (Association Jeunes Francophones et la Science, Montpellier, France)
Glossaire
Cellule de grille: ↑ Cellule nerveuse dans le cortex entorhinal qui crée une « carte de coordonnées » permettant la navigation et la métrique (jusqu’où et dans quelle direction) dans l’environnement.
Cellule de place: ↑ Cellule nerveuse située dans l’hippocampe et indiquant à l’animal sa localisation dans l’espace. Elle s’active à un emplacement spécifique de l’environnement. Elle différencie deux environnements en étant active ou inactive à une position très différente selon l’environnement [1].
Cellule de vitesse: ↑ Cellule nerveuse dont l’activité « enregistre » la vitesse à laquelle l’animal se déplace en augmentant son activité lorsque l’animal se déplace plus rapidement. Située dans le cortex entorhinal, elle sert à calculer la distance parcourue.
Cortex entorhinal: ↑ Zone profonde du cerveau, près de l’hippocampe, légèrement sous le niveau de l’oreille. Partie importante du système de navigation (la « carte cognitive »), elle contient, entre autres, les cellules de grille, les cellules de direction de la tête et les cellules de vitesse.
Cellule de la direction de la tête: ↑ Cellule nerveuse trouvée dans plusieurs zones du cerveau et informant l’animal de la direction dans laquelle il se dirige. Elle ne s’active que lorsque la tête est orientée dans une direction spécifique dans l’espace (par exemple, au nord-ouest, mais il s’agit d’une carte subjective à chaque individu qui ne suit pas les pôles magnétiques). Ainsi, une cellule qui est active lorsque la tête pointe vers le nord dans un environnement peut pointer vers le sud dans un autre environnement. Si une cellule est décalée de 180° dans un environnement, toutes les autres cellules font de même.
Conflit d’intérêts
Les auteurs déclarent que les travaux de recherche ont été menés en l’absence de toute relation commerciale ou financière pouvant être interprétée comme un potentiel conflit d’intérêts.
Remerciements
Nous remercions le professeur Yoram Burak pour ses commentaires.
Notes de bas de page
1. ↑ Tu peux en apprendre plus sur le système de navigation GPS ici.
2. ↑ Regarde cette vidéo.
3. ↑ Tu peux regarder ces modèles de cellules de grille qui se chevauchent et comment elles fournissent l’emplacement de l’animal dans cette vidéo.
Références
[1] ↑ Alme, C. B., Miao, C., Jezek, K., Treves, A., Moser, E. I., and Moser, M. B. (2014). Orthogonality of place maps in the hippocampus: eleven maps for eleven room. Proc. Natl. Acad. Sci. U.S.A. 111:18428–35. doi: 10.1073/pnas.1421056111
[2] ↑ O'Keefe, J., and Dostrovsky, J. 1971. The hippocampus as a spatial map: preliminary evidence from unit activity in the freely-moving rat. Brain Res. 34:171–5. doi: 10.1016/0006-8993(71)90358-1
[3] ↑ Kropff, E., Carmichael, J. E., Moser, M. B., and Moser, E. 2015. Speed cells in the medial entorhinal cortex. Nature 523:419–24. doi: 10.1038/nature14622
[4] ↑ Taube, J. S., Muller, R. U., and Ranck, J. B. 1990. Head-direction cells recorded from the postsubiculum in freely moving rats. I. Description and quantitative analysis. J. Neurosci. 10:420–35.
[5] ↑ Hafting, T., Fyhn, M., Molden, S., Moser, M. B., and Moser, E. I. 2005. Microstructure of a spatial map in the entorhinal cortex. Nature 436:801–6. doi: 10.1038/nature03721
[6] ↑ Banino, A., Barry, C., Uria, B., Blundell, C., Lillicrap, T., Mirowski, P., et al. 2018. Vector-based navigation using grid-like representations in artificial agents. Nature 557:429–33. doi: 10.1038/s41586-018-0102-6
[7] ↑ Høydal, Ø. A., Skytøen, E. R., Andersson, S. O., Moser, M. B., and Moser, E. I. (2019). Object-vector coding in the medial entorhinal cortex. Nature 568:400–4. doi: 10.1038/s41586-019-1077-7