Concept de base Santé humaine Publié le 4 octobre 2023

Mononucléose infectieuse : la maladie du baiser

Résumé

En 1964, un groupe de scientifiques a utilisé un microscope pour étudier les cellules d’une personne atteinte d’une maladie appelée lymphome de Burkitt. Ils ont vu de petites particules à l’intérieur des cellules et ont découvert qu’il s’agissait de virus. Ce virus est maintenant appelé virus d’Epstein-Barr et il peut provoquer une autre maladie appelée mononucléose infectieuse, également connue sous le nom de « la maladie du baiser ». Il s’agit d’une maladie difficile à diagnostiquer car elle peut présenter de nombreux symptômes qui sont également communs à d’autres maladies. As-tu déjà eu mal à la gorge et de la fièvre ? Peut-être que c’était dû au virus d’Epstein-Barr ! Ce virus affecte principalement les cellules du système lymphatique, qui défend le corps contre les infections : tu peux donc imaginer pourquoi il est si intéressant ! Continue à lire pour en savoir plus sur cette curieuse maladie.

La maladie du baiser : une maladie du système lymphatique

« La maladie du baiser » est un nom commun pour la mononucléose infectieuse, parfois aussi appelée « la mono ». La mononucléose infectieuse est causée par le virus d’Epstein-Barr. Ce virus se transmet dans des fluides tels que la salive, donc quand des personnes s’embrassent ou boivent dans le même verre, ils peuvent se le transmettre. Cette maladie affecte le système lymphatique, qui fait partie du système de défense de notre organisme. Le système lymphatique est comme un réseau de drainage qui parcourt tout le corps. Il comprend des tuyaux appelés vaisseaux lymphatiques, qui contiennent un liquide aqueux appelé lymphe. Lorsque la lymphe se déplace dans les vaisseaux, elle traverse des filtres de la taille d’un petit pois appelés ganglions lymphatiques, qui sont des points de contrôle qui surveillent et nettoient la lymphe.

Les globules blancs sont des cellules spéciales produites dans la moelle osseuse, qui se déplacent ensuite dans tout le corps par le biais du sang et de la lymphe. Le rôle des globules blancs est d’identifier et de combattre les microbes envahissants qui pourraient nous nuire. Il existe plusieurs types de globules blancs, parmi lesquels on trouve les lymphocytes. Les lymphocytes, que l’on trouve principalement dans les ganglions lymphatiques, peuvent reconnaître les intrus microbiens et prévenir ou guérir les infections. Lorsqu’une infection survient, les ganglions lymphatiques grossissent car ils produisent beaucoup de lymphocytes pour combattre l’infection. Les lymphocytes de type « B » combattent les microbes en produisant des molécules appelées anticorps, qui se lient aux microbes et les inactivent ou les éliminent.

La rate est un autre organe important du système de défense de l’organisme. La rate peut être comparée à un poste de police : elle fonctionne comme un grand filtre et peut repérer et piéger tous les microbes indésirables présents dans le sang. La rate est située dans la partie supérieure gauche de l’abdomen. Elle est également un site de production de lymphocytes. Ainsi, lorsque le corps combat une infection, la rate s’agrandit car ses lymphocytes se multiplient et produisent un grand nombre d’anticorps. Le réseau du système lymphatique est illustré dans la figure 1. Ces organes et cellules de défense sont sollicités lorsque des microbes envahissent le corps.

Figure 1 - Le système lymphatique et ses organes : les ganglions lymphatiques et la rate.
  • Figure 1 - Le système lymphatique et ses organes : les ganglions lymphatiques et la rate.
  • Le virus d’Epstein-Barr (EBV) est transporté par la salive d’une personne infectée et se transmet par un baiser ou par le partage d’objets tels que des verres ou des brosses à dents. L’EBV infecte les lymphocytes situés dans les ganglions lymphatiques. Image : Servier Medical Art sous licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported. Lexique. Lymphatic vessels : vaisseaux lymphatiques ; EBV particles : particules du virus EBV ; lymph node : ganglion lymphatique ; spleen : rate ; lymphocyte infected with Epstein-Barr virus : lymphocyte infecté par du virus Epstein-Barr (EBV).

La cause : le virus d’Epstein-Barr

En 1964, un groupe de scientifiques étudiait une autre maladie du système lymphatique appelée « lymphome de Burkitt ». Cette maladie survient lorsque quelque chose ne va pas dans les ganglions lymphatiques et que les lymphocytes prolifèrent de manière incontrôlée, causant l’apparition d’un type de cancer appelé « lymphome ». Les scientifiques essayaient de comprendre la cause de cette maladie. Alors qu’ils observaient au microscope les lymphocytes d’un patient atteint de ce lymphome, ils ont vu des particules à l’intérieur des cellules qui ressemblaient à un virus qu’ils avaient déjà vu auparavant, mais en plus petit [1]. Aujourd’hui, on appelle ce virus le « virus d’Epstein-Barr » (EBV) ou l’herpès-virus humain 4 (HHV-4). L’EBV est un membre de la famille des virus de l’herpès et on le trouve partout dans le monde.

Tous les virus qui infectent les humains ont besoin de cellules humaines pour survivre et se reproduire, et l’EBV ne fait pas exception. L’EBV infecte en particulier les lymphocytes B et peut vivre dans ces cellules pour le reste de la vie d’une personne. Il utilise ces cellules pour se multiplier, puis les détruit et en infecte d’autres, répétant ce processus à l’infini. Il libère alors des substances qui provoquent les symptômes de la mononucléose. L’EBV peut également rester dans le corps humain dans un état latent, c’est-à-dire que le virus ne se multiplie pas activement et les personnes infectées ne le savent pas parce qu’elles ne présentent pas de symptômes. Lorsque l’EBV est latent, les lymphocytes survivent.

La plupart des gens sont infectés par l’EBV à un moment donné de leur vie. L’EBV se transmet le plus souvent par les fluides corporels, principalement la salive. C’est pourquoi il peut se transmettre par les baisers ou par le partage d’objets tels qu’une brosse à dents ou un verre. Nous savons que l’EBV ne provoque généralement aucun symptôme chez les personnes infectées pendant l’enfance, qui est le moment où la plupart des gens entrent en contact avec ce virus. En revanche, une infection plus tard dans la vie, chez les adolescents ou les jeunes adultes, provoque une mononucléose symptomatique chez un patient sur quatre environ. Il est donc très important d’informer cette population sur la maladie et son mode de transmission, afin qu’elle puisse se protéger autant que possible. Les scientifiques étudient toujours l’EBV et tentent de comprendre pourquoi le virus provoque parfois la maladie et parfois non.

À quoi ressemble une infection au virus EBV ?

Comme nous l’avons mentionné, il est possible d’avoir une infection latente par l’EBV, ce qui signifie que le virus peut être stocké dans le corps sans provoquer de symptômes pendant de nombreuses années. Dans ce cas, le virus est généralement stocké dans la bouche, plus précisément dans l’oropharynx et les amygdales (Figure 2). L’oropharynx fait partie des voies digestives et respiratoires et permet de conduire l’air et les aliments vers leur destination finale : les poumons et l’œsophage respectivement. Les amygdales font partie du système lymphatique, ce qui explique pourquoi elles sont atteintes dans la mononucléose : elles sont la première partie du système lymphatique à entrer en contact avec l’EBV lorsqu’il pénètre par la bouche.

Figure 2 - Oropharynx et amygdales.
  • Figure 2 - Oropharynx et amygdales.
  • L’oropharynx est la partie centrale du pharynx (mot de grec ancien qui signifie « gorge »). Nous avons deux amygdales (« tonsil » en anglais), une de chaque côté de la paroi du larynx. Ce sont de petits organes porteurs de lymphocytes de même nature que les ganglions lymphatiques. Image de Servier médical Art sous licence Creative Commons Attribution 3.0 Unported.

Lorsque l’infection par le virus EBV provoque des symptômes, ceux-ci peuvent mettre 4 à 8 semaines à se développer. Tous les patients ne présentent pas tous les symptômes de la mononucléose, et les symptômes peuvent apparaître dans un ordre différent chez chaque patient. L’infection commence généralement par une sensation inhabituelle de fatigue et une faible fièvre. Ensuite, un mal de gorge apparaît et des ganglions lymphatiques enflent. La sensation de fatigue peut devenir très intense pendant les premières semaines de l’infection et peut durer des mois. À mesure que la maladie progresse, la fièvre devient souvent plus élevée, surtout l’après-midi et le soir. Les douleurs de la gorge s’aggravent également, et des taches blanches appelées « plaques » peuvent apparaître sur les amygdales. Les patients peuvent avoir du mal à parler et donner l’impression d’avoir une patate chaude dans la gorge quand ils y parviennent. Les ganglions lymphatiques, notamment ceux du cou, peuvent continuer à grossir et devenir douloureux. Si l’infection s’aggrave, la rate augmente également de volume. Une rate élargie n’est généralement pas gênante, mais elle peut se rompre si elle subit un choc, comme une chute. Cela peut être très dangereux, les patients doivent donc être prudents ! Heureusement, bien que les symptômes de la mononucléose puissent être inconfortables, voire douloureux, ils ne mettent généralement pas la vie du patient en danger.

Diagnostic et traitement

En général, si une personne se rend chez le médecin avec les symptômes décrits ci-dessus, un diagnostic de mononucléose sera posé. En cas de doute, des analyses de sang peuvent aider à poser le diagnostic. Les résultats les plus courants des analyses de sang sont une augmentation du nombre de lymphocytes, souvent de forme inhabituelle, et des modifications du fonctionnement du foie. Les médecins peuvent également rechercher des fragments spécifiques du virus EBV dans le sang et les anticorps que l’organisme du patient produit pour combattre l’infection [2].

Il est facile de confondre la mononucléose avec une infection bactérienne des amygdales (angine). Les médecins disposent d’antibiotiques qui traitent les infections causées par des bactéries, mais les antibiotiques ne traitent pas les infections causées par des virus ! Si des antibiotiques sont administrés à une personne atteinte de mononucléose, une éruption cutanée caractéristique peut apparaître, consistant en de petites taches rouges sur la peau, dont certaines sont accompagnées d’une petite bosse. Cette éruption cutanée peut aider à diagnostiquer la mononucléose.

On ne peut pas guérir l’EBV, les médecins ne peuvent qu’en traiter les symptômes. Il est normalement recommandé à un patient atteint d’EBV de boire beaucoup d’eau, de manger des aliments sains et de prendre des médicaments pour réduire la douleur et l’enflure [3]. Comme la rate peut être élargie et qu’elle est un organe très sensible, afin d’éviter sa rupture, il est recommandé aux patients d’éviter les sports de contact pendant les trois ou quatre premières semaines de la maladie.

Conclusion

La mononucléose infectieuse est une maladie virale causée par le virus EBV. Elle survient le plus souvent chez les adolescents et les jeunes adultes. Bien que les symptômes ne soient généralement pas graves, certaines personnes peuvent être malades pendant une longue période et peuvent même subir des conséquences graves comme une rupture de la rate. Nous devons donc faire de notre mieux pour prévenir l’infection par l’EBV en évitant de partager des objets personnels, comme les verres ou les brosses à dents, et d’embrasser les personnes malades. Nous pouvons également expliquer ce que nous savons sur la mononucléose à nos amis et à notre famille, afin qu’ils soient conscients des symptômes et empêchent la propagation de l’infection.

Contributions à la version française

TRADUCTEUR : Ludovic Gabellier (CHU de Montpellier, France)

ÉDITEUR : Catherine Braun-Breton (Association Jeunes Francophones et la Science, Montpellier, France)

MENTOR SCIENTIFIQUE : Océane Paris (Association Jeunes Francophones et la Science, Montpellier, France)

JEUNES EXAMINATEURS :

Alice, 9 ans. Je m’appelle Alice et j’ai 9 ans. Je suis en CM1. J’aime lire et je fais du théâtre. Mes matières préférées à l’école sont la science, la géographie, et l’histoire. J’adore jouer à loup glacé et les « Harry Potter » sont mes livres préférés, je suis super fan !

Lycée Saint Joseph Pierre Rouge, 15-16 ans. Nous sommes Enzo, Lyanna, Assia et Elena, en formation « Accompagnement Soin et Service à la Personne », dans la classe de Mme Barthélémy. Nous sommes des adolescents curieux et avons choisi cet article car le sujet nous concerne. Même si nous avons parfois du mal à nous concentrer, nous avons beaucoup apprécié ce travail sur l’article.

Glossaire

Mononucléose infectieuse: Infection causée par le virus d’Epstein-Barr (EBV) qui affecte le système lymphatique.

Système lymphatique: Système de défense de notre organisme. Il est composé de ganglions lymphatiques et de vaisseaux où circule la lymphe.

Ganglions lymphatiques: Filtres de la taille d’un petit pois qui surveillent et nettoient la lymphe. Ils aident à contenir les infections en libérant des agents de défense et des molécules qui protègent l’organisme.

Lymphocytes: Type de globules blancs ; petites cellules que l’on retrouve principalement dans les ganglions lymphatiques. Ils produisent des molécules qui luttent contre les infections. Certains d’entre eux produisent des anticorps.

Anticorps: Molécules capables de reconnaître les agents infectieux et d’aider l’organisme à les détruire.

Rate: Organe du système lymphatique situé dans l’abdomen qui participe à contenir certaines infections.

Virus d’Epstein-Barr (EBV): Membre de la famille des virus de l’herpès qui attaque les lymphocytes, les utilise pour se multiplier, les détruit et en infecte d’autres. Il est responsable de la mononucléose infectieuse.

État latent: État dans lequel le virus reste inactif dans l’organisme d’une personne sans provoquer de symptômes. Le virus peut se « réveiller » et provoquer la maladie en se multipliant.

Conflit d’intérêts

Les auteurs déclarent que les travaux de recherche ont été menés en l’absence de toute relation commerciale ou financière pouvant être interprétée comme un potentiel conflit d’intérêts.


Références

[1] Epstein, M. A., Achong, B. G., and Barr, Y. M. 1964. Virus particles in cultured lymphoblasts from Burkitt’s lymphma. Lancet 283:702–70. doi: 10.1016/s0140-6736(64)91524-7

[2] Naughton, P., Healy, M., Enright, F., and Lucey, B. 2021. Infectious mononucleosis : diagnosis and clinical interpretation. Br J Biomed Sci. 78:107–16. doi: 10.1080/09674845.2021.1903683

[3] Ebell, M. H. 2004. Epstein-Barr virus infectious mononucleosis. Am Fam Physician 70:1279–87.